Les
violences faites aux filles et les mariages précoces résistent encore dans la
région de l’Extrême Nord. Bien que réduit, le phénomène se porte encore mieux
dans certaines localités.
Malgré l’effort, les mécanismes mis sur pieds par les différentes
associations en charge de lutte contre le mariage précoce et forcé, le fléau
reste encore perceptible dans les villages et campagnes de la région de
l’Extrême Nord. C’est la raison pour laquelle, consciente du phénomène et du
défi à relever, l’Association de Lutte
contre les Violences faites aux Femmes (ALVF), antenne de l’Extrême-Nord a
réuni les acteurs du terrain pour les former. Ceci sur plusieurs modules. Les
15 membres des organisations de la société civile ont appris l’utilisation des
réseaux sociaux, la mise en ligne de l’image vidéo et orale à travers les blogs
et You tube. L’objectif étant de renforcer les capacités et les moyens en communication
des associations de défense des victimes/survivantes des violences faites aux
filles. En plus, produire 96 films sur les violences sexuelles, sexistes
basées sur le genre. Que chaque participant(e) soit capable d’améliorer son
projet par une meilleure identification des témoins pour la réalisation des
films en fonction des thématiques à traiter.
Il faut rappeler que ces
mauvaises pratiques qui jusque-là résistent ; quoi qu’on dise sont
favorisées par le silence, la non dénonciation ainsi que la non implication de
manière directe du pouvoir public. Notons aussi que dans la région de l’Extrême
Nord plus particulièrement, ces phénomènes sont accentués par les incursions
répétées de Boko haram dans certaines localités frontalières avec le Nigeria.
Et contribue à la déstabilisation des populations. Étant entendu les femmes et
les filles sont les cibles de boko haram. Toute chose qui fait en sorte que les
femmes ont peur d’envoyer leurs filles à l’école, dans les espaces publics de
peur qu’elles ne soient enlevés.
Cette
formation permettra d’intensifier l’intervention des actions de l’ALVF avec les
« brigades de dénonciation » dans les localités fortement impliquées
et en milieu scolaire entre autres. Un milieu dans lequel se trouvent les
filles bénéficiaires des actions du projet.
Réactions des participants.
Dzavai Vagsa, ADEVIFE Mokolo
« Durant
ces trois jours, nous avons appris beaucoup de choses. Nous avons appris la
production des témoignages à travers les médias sociaux avec les vidéos et
verbaux. Les jours de formation ont été tellement riches ; vu la capacité
de nos formateurs qui nous ont déjà édifié en plusieurs techniques soit pour
créer des adresses sur facebook, soit pour créer les blogs, soit pour envoyer
des images sur YouTube. On peut dire que
nous sommes déjà des journalistes puisque tout ceci doit être accompagné d’un
protocole d’interview. Ces techniques vont nous permettre de mieux prendre les
images de qualité sur le terrain afin de les mettre en ligne. Soit sur le blog
ou encore sur You tube. »
« Il
faut déjà souligner que nous rencontrons beaucoup de difficultés dans le
travail que nous faisons. Les chefs traditionnels réclament de l’argent comme
nous travaillons avec les partenaires. Des moyens pour pouvoir mobiliser les
populations. Ils nous disent aussi qu’il leur faut des moyens de communication
ou les moyens de déplacement pour aller de maison en maison pour conscientiser
les parents. En plus les mères d’enfants sont très sensibles aux mariages
précoces. Quand un parent nous entend en train de parler de la sexualité, des
menstruations, du coup ils nous disent que pourquoi est-ce qu’on parle de telle
chose aux enfants alors qu’ils n’ont pas encore l’âge de procréer. Ces moyens vont nous aider à partager
l’information à plusieurs personnes et à moindre coup. »
Rampata Olivier Association pour la promotion et l’éducation de la jeune fille
dans la vallée du Logone(Apef)
« Au
niveau du département du Mayo Danay, la violence faites aux filles en milieu
scolaire et hors des établissements sont légions. Et le mariage précoce y est
constant jusque-là dans plusieurs arrondissements. Il s’agit de
l’arrondissement de Kalfou et celui de Yagoua entre autres. Je pense qu’avec ce
que l’ALVF est en train de mener, cela vous nous aider à éradiquer davantage
ces fléaux. J’ai eu à retenir plusieurs aspects lors de cette formation. Nous
savons désormais enregistrer une interview, comment créer un compte facebook,
un compte blog, comment réaliser une bonne interview avec une victime. En plus,
comment utiliser ces réseaux sociaux pour mieux atteindre le maximum de
personnes une fois que les témoignages vidéo et audio sont sur You tube ou
alors sur le blog. »
Bilkoussou Alh Ibrahima alvf/ Centre vie de femme de Maroua.
« Les
formateurs nous ont appris à développer des nouveaux moyens de sensibilisation
à travers les réseaux sociaux. Avec cette formation, nous souhaiterons amener
les victimes à rendre plus visible leur vécu, leur souffrance pour toucher de
près la population, qu’on puisse mieux les entendre dans le monde humanitaire.
L’utilisation des réseaux sociaux que nous avons appris durant ces trois jours
va véritablement nous aider. Dans la mesure où cela informe bon nombre de
personnes à la fois et cela ne nécessite pas beaucoup de moyens financier. Il
suffit juste de partager notre adresse et ceux qui sont connecté peuvent avoir
accès à tous nos activités, ce que nous publions comme informations. La
première action une fois rentrer c’est de renforcer une fois de plus sur
l’utilisation e ces réseaux sociaux. »
BILLE SIKE,
Responsable d’Antenne
L’atelier
sur les productions des vidéos par nos partenaires terrains, les associations
de dénonciation des violences faites aux filles, est la fin d’un processus qui a
commencé par la conscientisation des communautés éducatives, l’accompagnement
de ces communautés pour la création des associations de dénonciation, le
renforcement des capacités des membres à travers l’encadrement des filles à
l’école et hors de l’école, le fonctionnement des centres d’écoute au sein des
écoles primaires et la création des clubs de filles. Maintenant, il s’agit de
permettre à ces filles encadrées depuis plus de cinq (5) ans, de témoigner à
travers leurs histoires, des violences vécues.
Madame le coordonnateur dans quel cadre s’inscrit cette formation de trois jours que vous avez organisés ?
La formation sur de la collecte des témoignages vidéos
et oraux s’inscrit dans le cadre des actions de lutte contre les mariages
forcés et précoces appelé mariage d’enfant. Et ces activités nous permettent
renforcer nos stratégies de communication et de diffusion des informations sur
le travail que les différentes organisations de défenses de droit des filles et
des femmes font dans notre pays et plus précisément dans la région de l’Extrême
Nord. Il faut rappeler que nous sommes dans un contexte ou la situation
sécuritaire est délicate avec tout ce que nous connaissons déjà. Et puis bien avant
cela, les droits des femmes étaient quelque un peu critiques. On observait que les
droits des filles et des femmes n’étaient suffisamment pas respectés. Et cette
situation est venue davantage renforcer le sentiment de délit de non respect de
ces droits là. Et pour nous c’est important de renforcer la voix et même de
poster la voix des victimes, des survivantes qui vivent cette situation à
l’extérieur, auprès des communautés qui ne sont pas proches d'elles et auprès des
autorités qui doivent prendre de décisions pour pouvoir changer la situation
actuelle.
Pourquoi avoir
choisir de marquer un temps uniquement sur les réseaux sociaux ?
Déjà au niveau de notre association, l’association de
lutte contre les violences faites aux femmes (ALVF), nous sommes engagés dans
un programme de briser le silence et lever les tabous sur les violences faites
aux filles et aux femmes appelées également violence basée sur le genre. En
depuis 2014, nous nous sommes engagés avec d'autres organismes sous régionaux
pour pouvoir créer une plate-forme où nous échangeons sur nos stratégies
d’intervention, partageons des témoignages des victimes et des survivantes.
Pour nous c’était, important que les organisations avec lesquelles nous
travaillons soient au même niveau de compréhension et de travail que nous.
Donc, nous avons jugé qu’il était important que les associations de
dénonciation qui sont nos partenaires terrain et qui ont les centres d’écoutes
comme les nôtres, qui collectent des témoignages ; qu’ils puissent
également mettre à la face du monde, de la communauté et des décideurs les souffrances
émotives des victimes de violences et survivantes des violences sexuelles et
sexistes.
Êtes vous satisfaite
à l’issu de cette formation ?
Pour nous c’est une grande satisfaction. Parce que
déjà, toutes les personnes que nous avons conviées notamment les 12 délégués
des associations de dénonciation sont à même d'avoir de compte électronique.
Ça, c’est déjà une avancée. Ils ont été capables d’ouvrir des blogs, et ils
deviennent déjà des blogueurs comme nous autres. Et puis cette plate forme nous
a permis de fusionner et d’avoir une très grande plate forme que nous avons dénommé
« anti discri ». Dans
laquelle toutes les publications de toutes ces personnes formées vont être visibles
par tout le monde. Ce qui est à venir c’est que les apprentissages reçus
doivent être mises en pratique. Et ces personnes une fois rentrées chacune dans
sa localité respective doivent produire des vidéos pour pouvoir les poster dans
les blogs qui ont été créés.